Victoire des anciens salariés de l'Alloeu : un message fort envoyé au patronat
5 SEPTEMBRE 2012
C'est la fin d'un épisode juridique qui aura duré trois ans. Mercredi 29 août, les quatre-vingt quinze salariés licenciés de la confection de l'Alloeu en 2009 ont reçu leur chèque de dédommagement en main propre.
Au total, une somme de plus de deux millions d'euros a été répartie à l'ensemble des licenciés. En début d'année, la cour d'appel de Douai confirmait une « absence de cause réelle et sérieuse de licenciement », allant à l'encontre du conseil des prudhommes de Lille qui avait débouté les plaignants en 2010. Cette décision a ainsi permis aux licenciés de toucher des dommages et intérêts.
Les deux millions d'euros ont été attribués aux salariés en fonction de plusieurs critères : l'ancienneté, la qualification et la capacité à retrouver un emploi. Selon le syndicat CGT qui a porté le dossier devant la justice, chaque personne a touché entre 15 000 euros et 20 000 euros de l'AGS, un organisme qui assure les salariés contre le non paiement. « C'est un soulagement, on a eu l'impression d'être jetés comme des malpropres à l'époque », commente Viviane Six, 55 ans, piqueuse à la confection depuis vingt-et-un ans au moment de son licenciement.
Aujourd'hui, Viviane a retrouvé un contrat à durée indéterminée en tant qu'employée familiale après avoir suivi une formation de quatre mois.
Mais pour bon nombre de salariés, ce dédommagement demeure toutefois insuffisant. C'est le cas de cette ancienne coupeuse originaire de Neuf-Berquin qui comptait vingt-sept années de service au compteur. « J'ai suivi une formation pour être surveillante de nuit. Aujourd'hui j'ai un 35 h chez les Papillons blancs. Ce dédommagement n'est pas suffisant, on méritait plus ! », estime-t-elle.
Même sentiment chez Jérôme Dubois, de La Gorgue, qui s'est retrouvé sans emploi à 27 ans jusqu'à maintenant. « Normalement j'aurais un job de cariste à Merville dans un mois », espère t-il.
Victoire d'un « prestataire-taxi »
Pour le syndicat CGT, il s'agit surtout de faire passer un message au patronat. Maurad Rami, secrétaire général à la CGT, explique : « quand vous touchez au portefeuille des patrons, le message passe. La fédération gère 1 700 dossiers, on n'en a perdu aucun. Le Medef m'a déjà appelé pour me dire de ne plus siphonner les caisses de l'AGS ! » Les représentants syndicaux ont tenté de faire passer un autre message mercredi devant les salariés réunis à la Maison pour Tous. « C'est grâce à la CGT que vous avez gagné ! Ensemble, on est plus fort », insistait le secrétaire général.
Mais l'un des représentants syndicaux le confiait : la CGT devient de plus en plus un « prestataire-taxi », oublié dès qu'un dossier est bouclé. Combien de salariés se syndiqueront après cet épisode ? « Très peu... » déplorait notre interlocuteur. Une à une, les quatre-vingt quinze personnes ont défilé devant le secrétaire général pour saisir leur chèque tant attendu. Pour les ex de l'Alloeu, le combat s'arrête là.
N. de R.